« Le vrai Parisien n’aime pas Paris, mais il ne peut vivre ailleurs » – Alphonse Karr
Paul Verlaine, « Paris » (1893)
Paris n’a de beauté qu’en son histoire,
Mais cette histoire est belle tellement !
La Seine est encaissée absurdement,
Mais son vert clair à lui seul vaut la gloire.
Paris n’a de gaîté que son bagout,
Mais ce bagout, encor qu’assez immonde,
Il fait le tour des langages du monde,
Salant un peu ce trop fade ragoût.
Paris n’a de sagesse que le sombre
Flux de son peuple et de ses factions,
Alors qu’il fait des révolutions
Avec l’Ordre embusqué dans la pénombre.
Paris n’a que sa Fille de charmant
Laquelle n’est au prix de l’Exotique
Que torts gentils et vice peu pratique
Et ce quasi désintéressement.
Paris n’a de bonté que sa légère
Ivresse de désir et de plaisir,
Sans rien de trop que le vague désir
De voir son plaisir égayer son frère.
Paris n’a rien de triste et de cruel
Que le poète annuel ou chronique,
Crevant d’ennui sous l’œil d’une clinique
Non loin du vieil ouvrier fraternel.
Vive Paris quand même et son histoire
Et son bagout et sa Fille, naïf
Produit d’un art pervers et primitif,
Et meure son poète expiatoire !
Questions :
- Quelle est la qualité essentielle de Paris d’après Verlaine ?
- Dans les strophes 2 et 3, quelles sont les caractéristiques positives de Paris ?
- Relevez dans la dernière strophe le ver qui fait l’éloge de Paris. Pour quelle raison Verlaine utilise-t-il la locution « ne… que » ?
Thibault Sardier, « L’exode urbain, ce n’est pas pour toute fuite », Libération, 20/02/2022
Les Parisiens ont quitté la capitale lors du confinement. Mais sur le long terme, aucun dépeuplement des villes ne se dessine. Globalement, les territoires déjà attractifs avant le Covid le sont restés, selon les premiers résultats d’une étude pluridisciplinaire.
Printemps 2020. Dans un pays confiné, les Français découvrent dans les médias des images de leurs villes désertées. Non seulement parce qu’il est interdit de sortir, mais aussi parce que beaucoup de citadins ont trouvé refuge à la campagne. Lorsque les restrictions s’allègent quelques semaines plus tard, tout le monde ne revient pas. La presse suit ces cadres qui ont choisi de déménager loin des métropoles, choisissant le télétravail ou la reconversion vers la permaculture, l’artisanat, le tourisme. Les commentateurs y voient l’amorce d’une baisse massive de la population des villes au profit des communes rurales dont la qualité de vie serait largement supérieure. Il faut trouver un nom au phénomène : ce sera « l’exode urbain ». Comme un retour de flamme après le siècle d’exode rural qui avait vu les campagnes se vider au profit des villes, entre le milieu du XIXe siècle et l’après-Seconde Guerre mondiale. Supposé aussi massif qu’inédit, l’actuel mouvement de fuite a entraîné beaucoup de questions : « Quel avenir pour les campagnes tout à coup prises d’assaut ? Et que faire des espaces urbains soudain déconsidérés et peut-être promis à l’abandon ?».
En fait, le big bang n’a pas eu lieu. Dans une étude intitulée « Exode urbain ? Petits flux, grands effets. Les mobilités résidentielles à l’ère (post-)Covid » qui livre ses premiers résultats, une équipe pluridisciplinaire l’affirme : « La pandémie de Covid-19 n’a pas bouleversé de fond en comble les structures territoriales françaises. » Pour l’affirmer, les chercheurs ont étudié les recherches immobilières effectuées sur les sites MeilleursAgents, SeLoger et Leboncoin, pour voir vers quelles destinations se projettent les Français. Ils ont aussi analysé les changements d’adresse déclarés par des particuliers à la Poste. Enfin, ils ont réalisé des études de terrain dans les Cévennes, les Pyrénées, ou encore les Vosges.
Extension de la périurbanisation
Résultat : la pandémie a bel et bien augmenté la mobilité, un peu. Le géographe Max Rousseau, qui a coordonné les enquêtes de terrain de l’étude, parle d’un « effet moisson », et explique que les nouvelles mobilités engrangées ces deux dernières années tiennent surtout au déclic qu’a pu représenter la pandémie auprès de personnes qui avaient déjà des projets en tête. En revanche, l’augmentation observée est bien loin de vider les villes : d’après les données de la Poste, les centres-villes de l’agglomération parisienne perdaient déjà des habitants avant la pandémie, et la situation s’est très peu amplifiée depuis. De plus, ceux qui bougent vont rarement s’installer au cœur de la France rurale. Comme avant le Covid-19, les territoires les plus attractifs sont les espaces littoraux, les grandes métropoles et surtout les espaces périurbanisés qui les entourent. De jeunes actifs quittent Paris mais visent Marseille, des familles bordelaises s’éloignent de quelques dizaines de kilomètres du centre-ville, des préretraités gagnent la Bretagne en veillant à ne pas être trop loin d’une ville avec supermarché et établissements de santé. Quant aux campagnes qui gagnent des habitants, même lorsqu’elles sont éloignées des villes, bon nombre d’entre elles connaissaient déjà depuis plusieurs années une croissance lente mais certaine.
Alors pourquoi parler d’ « exode urbain » ? « Le terme a un mérite : il permet de voir tout de suite de quoi l’on parle, et d’inscrire dans le débat public ces questions liées à l’aménagement du territoire, explique la géographe Hélène Milet, directrice du programme Popsu Territoires, l’une des coordinatrices de l’étude. Mais y voir le miroir inversé de l’exode rural, c’est une vue de l’esprit. Il n’y a pas d’effet d’“essorage” des villes au profit des territoires ruraux. »
Des changements, il y en a quand même, mais ils sont discrets. L’étude pointe l’existence de « signaux faibles » à ne pas négliger. Il y a d’abord les effets du télétravail, testé et approuvé par de nombreux Français. Puisqu’ils n’ont plus à se déplacer tous les jours, certains décident de s’éloigner encore plus de leur lieu de travail et consentent à des trajets moins fréquents mais plus longs. « Cela débouche sur un phénomène de “méga-périurbanisation”, autrement dit, une extension des espaces concernés par la périurbanisation, décrit le géographe Max Rousseau. »
Questions :
- Pour quelles raisons le journaliste estime-t-il qu’il est peut-être exagéré de parler d’exorde urbain ?
- A quel propos le géographe Max Rousseau parle-t-il « d’effet moisson » ?
- En quoi consiste le phénomène de méga-périurbanisation ?
Gaspard Koenig, Pour en finir avec le jacobinisme (2021)
Face à la dégradation de la situation sécuritaire en Guadeloupe et en Martinique, le ministre des Outre-mer a lâché le mot tabou : « autonomie ». En effet, comment des mesures sanitaires conçues à Paris pourraient-elles s’appliquer à des territoires aussi spécifiques ? Immédiatement, la classe politique unanime a réaffirmé le mythe fondateur de la « République une et indivisible ». Les élus corses n’ont pas été moins prompts à réclamer, pour leur île aussi, une plus large autonomie. Pourquoi les antillais obtiendraient-ils par la violence ce qu’eux-mêmes demandent par les urnes ?
Il semble malvenu d’aborder le sujet sous l’angle de la décolonisation. Ce serait enfermer les Antilles et plus généralement des départements d’outre-mer dans une identité figée par un lointain rapport de domination, alors que leur population ne cesse de revendiquer son appartenance à la France : lors du dernier référendum, la Guyane et la Martinique ont rejet à plus de 70% un statut plus autonome de « communauté d’outre-mer » […]
Si donc la question de l’autonomie fait sens pour les Antilles, c’est parce qu’elle se pose à toutes les collectivités françaises, y compris les plus métropolitaines d’entre elles. Plutôt que d’accord tel ou tel statut spécifique à la Guadeloupe, la Martinique ou la Corse, il faudrait refonder l’ensemble de notre organisation territoriale et en finir avec le jacobinisme. Comme l’a souligné le nouveau président de l’Association des maires de France, David Lisnard, la situation actuelle n’est satisfaisante pour personne. D’un côté, l’État engagé depuis 40 ans dans un processus de décentralisation a transféré de nombreuses compétences aux collectivités locales. Mais de l’autre, ces mêmes collectivités voient leurs marges de décision constamment réduites. Elles se sentent perdues dans l’enchevêtrement d’une multitude d’échelons et d’interlocuteurs, corsetées par des textes de plus en plus précis et surtout dépendantes de l’État pour obtenir leurs budgets (via des systèmes opaques de dotations et de subventions). Autrement dit, l’État reste maître du jeu, définissant en dernier ressort les politiques à mettre en œuvre et les moyens de les financer. Une véritable autonomie reposerait à l’inverse sur une « subsidiarité ascendante », concept qui remonte à Aristote mais qui a été récemment remis au goût du jour par le chercheur en science politique Raul Magni-Berton. Le plus petit échelon territorial (la commune ou la communauté de communes) se verrait ainsi confier par défaut l’ensemble des compétences ; libre à lui de déléguer celles dont il ne souhaite par l’échelon supérieur. Tout en haut de la pyramide, l’État récupérerait logiquement ce qui est trop compliqué, trop coûteux, trop délicat. Tel est son rôle légitime : voiture-balai. Ainsi les territoires pourraient-ils se différencier, enrichissant la nation de leur diversité. L’Alsace-Moselle pratique depuis un siècle un droit extrêmement spécifique, sans que le patriotisme de ses habitants soit en doute…
Bien entendu, l’autonomie implique la responsabilité. Responsabilité fiscale : les collectivités pourraient lever l’impôt sur les compétences dont elles souhaitent se doter (des mécanismes de péréquation permettant de corriger les inégalités entre territoires). Et responsabilité démocratique : les référendums locaux devraient devenir la règle (alors qu’ils restent aujourd’hui soumis au bien vouloir des exécutifs). […]
Quelle que soit la méthode retenue, la question de l’autonomie locale est aujourd’hui centrale pour moderniser l’État de droit. Et prendre enfin, après deux siècles de tâtonnement, le tournant girondin !
Questions :
- Quel est le mythe fondateur de la république française selon Gaspard Koenig ? Quelle conséquence ce mythe a sur les territoires ultramarins ?
- Quelles sont les deux raisons majeures pour lesquelles Gaspard Koenig désire en finir avec le jacobinisme ?
- Expliquez la formule finale
Aisling Ní Chúláin & Naira Davlashyan, Qu’est-ce que la « ville du quart d’heure » et comment peut-elle changer nos vies ? (2021)
Lorsque le Covid-19 a frappé l’année dernière en 2020, il a entraîné avec lui la fermeture des écoles et des bureaux, vidé les transports publics et, dans certains cas, restreint les habitants à un périmètre étroit autour de leur maison.
Mais avec l’adage “faire feu de tout bois” à l’esprit, ce sont précisément ces restrictions qui ont donné aux urbanistes l’occasion de repenser la façon dont nous pouvons réorganiser nos villes de manière plus écologique et durable.
C’est ainsi qu’est né le concept de la “ville du quart d’heure”, qui stipule que tous nos besoins fondamentaux devraient être satisfaits en moins de 15 minutes de marche ou de vélo de notre domicile.
Qu’est-ce qu’une “ville du quart d’heure” ?
“La ville du quart d’heure cherche à promouvoir une ville où les services des proximité viennent faciliter la vie et aux citoyens”, explique le professeur Carlos Moreno interrogé par Euronews Next.
“Nous voulons que, dans la ville, à l’endroit où nous habitons, on ait se déplacer moins loin, que ça soit pour aller travailler, pour aller faire ses courses, pour se soigner, pour accéder à la culture ou pour se prélasser”.
Au lieu d’avoir des villes avec des quartiers distincts pour vivre, socialiser et travailler, le concept de Moreno envisage le centre urbain comme une tapisserie de quartiers où ces trois fonctions coexistent.
Selon Carlos Moreno, l’évolution spectaculaire vers le travail à distance a démontré que la “ville du quart d’heure” est non seulement réalisable, mais qu’elle pourrait aussi contribuer à régénérer les quartiers urbains.
Un bâtiment, des usages multiples
La création de nouveaux espaces est un autre élément clé de la “ville du quart d’heure”.
Selon le professeur Moreno, afin de fournir un maximum de services et d’activités au niveau local, nous devons ré-imaginer la manière dont nous pouvons utiliser au mieux les infrastructures existantes.
“On a vu qu’à Paris, les taux d’utilisation d’un bâtiment se situent entre 30 et 40%. Cela signifie que entre 60 et 70% du temps, le bâtiment va être quasiment vide”, a-t-il déclaré.
“Et pourtant, il est là dans de très bonnes conditions. Donc, on veut davantage utiliser un bâtiment, faire en sorte qu’il accueille d’autres activités que celles pour lesquelles il a été au départ conçu. On appelle ça la chronotopie, un lieu avec plusieurs usages et chaque usage des nouveaux possibles”.
Dans le concept de Carlos Moreno, les bâtiments désaffectés pourraient être transformés en espaces de co-working. Les écoles pourraient être ouvertes le week-end pour des activités culturelles. Une salle de sport de jour pourrait être transformée en discothèque de nuit. Les cafés pourraient accueillir des cours de langues le soir et les bâtiments publics pourraient accueillir des concerts le week-end.
La “ville du quart d’heure” va-t-elle exacerber les disparités urbaines ?
Si le concept de “ville du quart d’heure” gagne en popularité dans le monde entier, l’idée de quartiers hyper-locaux accessibles ne fait pas l’unanimité.
Les critiques suggèrent qu’elle pourrait conduire à une sorte de tribalisme et exacerber les disparités urbaines existantes entre les quartiers.
En réponse à cela, Carlos Moreno souligne que, dans des villes comme Paris, l’inégalité entre ceux qui vivent en banlieues et les communautés plus riches qui peuplent le centre urbain est déjà une réalité.
Le fait que les bureaux, les activités sociales et les espaces culturels soient fortement centralisés autour d’un noyau urbain favorise fortement les communautés plus riches qui peuvent se permettre de payer les loyers élevés d’un centre-ville, affirme-t-il : “Aujourd’hui, les villes sont très inégalitaires. Aujourd’hui, les villes sont très fragmentées, très segmentées”.
M. Moreno estime qu’au contraire la “ville du quart d’heure” peut réellement favoriser la cohésion sociale dans les villes.
“La ville du quart d’heure réduira les inégalités car nous voulons que le territoire devienne polycentrique. Nous voulons améliorer la qualité de vie dans les quartiers défavorisés en mettant en place des lieux de co-working, en créant des espaces verts, des parcs, en installant des entreprises, des activités culturelles, des activités sportives et des pistes cyclables de qualité”.
Une ville polycentrique, selon Carlos Moreno, est une ville où chaque personne peut aller où elle veut mais n’a pas besoin de faire une heure de trajet pour satisfaire un besoin comme c’est le cas actuellement.
Questions :
- Relevez la définition que Carlos Moreno donne de Paris, « ville du quart d’heure ».
- A combien se monte à Paris le taux d’usage d’un bâtiment ? Quelle solution Moreno propose-t-il pour utiliser au mieux les infrastructures existantes ?
- En quoi consiste le polycentrisme défendu par Carlos Moreno (2 derniers paragraphes)
Eve Szeftel, « A Paris, la mixité sociale est forte et se maintient », Libération, 2023
Une étude bat en brèche les idées reçues sur Paris : 48 % des habitants vivent dans un quartier mixte, mêlant des revenus faibles, intermédiaires et élevés, et 21 % dans un quartier ségrégué.
Paris, une ville de bobos ? Une métropole riche, cernée de communes pauvres ? La construction de logements sociaux contribue à la ghettoïsation ? A l’heure où la mairie de Paris est une nouvelle fois sous le feu des critiques après la révélation que la capitale a perdu 123 000 habitants en dix ans, une étude de l’Insee Ile-de-France et de l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) vient battre en brèche un certain nombre d’idées reçues, qui imprègnent si bien les représentations et les discours qu’on finit par les croire vraies. Voici les cinq enseignements de ce rapport intitulé « Mixité sociale et ségrégation dans la métropole du Grand Paris : état des lieux et tendances sur quinze ans », de 2004 à 2019.
1 — Paris est une ville très ségréguée : faux
Dans la Métropole du Grand Paris (MGP), 37 % de la population (soit 2,6 millions de personnes) réside dans un quartier considéré comme mixte, et 21 % (1,4 million) dans un quartier ségrégué, qu’il soit riche ou pauvre. Et, parmi les 131 communes de la MGP, « c’est à Paris que la part des habitants vivant dans les quartiers les plus mixtes est la plus importante en comparaison des onze établissements publics territoriaux (EPT) : près de la moitié (48 %) des Parisiens résident dans un quartier considéré comme mixte », écrit l’étude. Une mixité surtout portée par les arrondissements de l’est parisien (les Xe, XIe, XIIe, XIIIe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements).
Point méthodologique : un quartier, c’est un agrégat de carreaux de 200 mètres de côté, où sont analysées les disparités de revenus. Un quartier mixte brasse, de manière équilibrée, des revenus élevés, intermédiaires et plus faibles. Un quartier ségrégué, à l’inverse, se caractérise par une concentration de revenus élevés ou modestes.
2 — Le Grand Paris est le territoire où les écarts de revenus sont les plus grands : vrai
Du point de vue des revenus, la MGP est la plus ségréguée des 22 métropoles françaises, avec un écart d’un à cinq entre les 10 % des ménages les plus modestes (revenu mensuel inférieur à 900 euros) et les 10 % les plus aisés (revenu supérieur à 4 500 euros). Mais si, au lieu d’étudier les écarts de revenus « entre les quartiers comme on le fait d’habitude, on analyse la répartition territoriale de ces revenus » explique Emilie Moreau, directrice d’étude à l’Apur, alors la mégapole parisienne n’est plus que le «cinquième pôle le plus ségrégué» de France, derrière les métropoles de Rouen, Lille, Tours et Marseille-Aix.
3 — L’est parisien est plus pauvre que l’ouest : vrai
L’étude conforte la division territoriale : les quartiers les plus pauvres se trouvent à l’est, les plus riches à l’ouest. Sans surprise, c’est en Seine-Saint-Denis, au sein des agglomérations Plaine Commune et Paris Terres d’Envol, que se concentrent les ménages à faibles revenus, notamment à La Courneuve, Aubervilliers, Stains, Pierrefitte-sur-Seine et Sevran. Là, « le parc locatif social est prédominant et la proportion de familles monoparentales y est plus élevée qu’ailleurs ». S’y ajoutent Bobigny et Clichy-sous-Bois, la ville dont l’actuel ministre du Logement, Olivier Klein, a longtemps été maire. Les catégories sociales privilégiées, elle, ont élu domicile dans l’EPT Paris Ouest La Défense, en particulier à Vaucresson et Neuilly-sur-Seine, « où plus de la moitié des ménages sont propriétaires de leur logement ». Ailleurs, elles se concentrent à Paris (VIe, VIIe et XVIe arrondissements, nord du VIIIe, sud-ouest du XVIIe), autour du parc de Sceaux, à Meudon, Sèvres et Marnes-la-Coquette, ou encore aux abords du bois de Vincennes et le long de la Marne.
4 — Le logement social accroît la ghettoïsation : vrai et faux
Tout est une question d’équilibre. Un excès de logements sociaux favorise la ségrégation, mais un déficit aussi. « Il ressort de l’étude que le parc de logements est l’une des variables les plus importantes pour la mixité », relève le sociologue Clément Boisseuil, de l’Apur. « On a analysé la structure du parc dans les quartiers les plus mixtes et elle est équilibrée », confirme Emilie Moreau. Ainsi, dans les quartiers les plus mixtes du Grand Paris, 25 % des ménages résident dans le parc social, 36 % dans le parc locatif privé et 39 % sont propriétaires occupants. « A l’inverse, à peine plus de 1 % des ménages des quartiers ségrégués aisés sont locataires du parc social, tandis que 71 % le sont dans les quartiers ségrégués modestes ».
5 — La gentrification fait reculer la mixité sociale : faux
Avec un recul de 1,3 point de 2004 à 2019, la mixité sociale résidentielle est quasi stable dans le Grand Paris. A une échelle plus fine, on note une évolution contrastée : elle recule dans certains quartiers sous l’effet de « l’embourgeoisement », comme à Issy-les-Moulineaux, Boulogne-Billancourt ou Levallois-Perret, où les prix de la pierre augmentent, ou, à l’inverse, sous l’effet de la « paupérisation » (Sevran, Blanc-Mesnil, Drancy). En revanche, la gentrification (arrivée de ménages plus aisés ou départ de ménages modestes) créé de la mixité. C’est le cas dans le périmètre de Plaine Commune (Aubervilliers, Saint-Denis, Saint-Ouen, etc.) même si elle part de bas (seule 14 % de la population de l’agglomération vit dans un quartier mixte). En réalité, relève Clément Boisseuil, «la gentrification est un phénomène assez isolé, qui ne concerne que certains quartiers, dans Paris et dans les communes limitrophes de Paris », comme Malakoff, le Pré-Saint-Gervais, les Lilas ou le Kremlin-Bicêtre, où 83 % de la population vit dans un quartier brassé.
Et à l’avenir ? Le Grand Paris va être transformé par la mise en service progressive du Grand Paris Express, qui a déjà commencé avec les prolongements des lignes 12 et 14, les aménagements en vue des Jeux olympiques de 2024, et l’ensemble des projets urbains engagés dans la métropole, par exemple les « quartiers de gare » qui sortent de terre autour des stations du GPE.
Questions :
- Relevez les éléments qui permettent d’affirmer que Paris « n’est pas une ville très ségrégée »
- Quelles sont les quartiers les plus pauvres de Paris et pourquoi ?
- Quelles sont les deux raisons principales pour lesquelles la gentrification n’a finalement pas fait reculer la mixité sociale ?