Quelques repères
Liste non exhaustives des grandes découvertes du XIIIème au XVIème siècle
- Marco Polo, marchand vénitien, entreprend un voyage vers la Chine où il se met au service du pouvoir Mongol. Il n’est pas le premier à aller jusqu’à la Chine, mais il est le premier à écrire sur les réalités Chinoises, ce qui inspirera de nombreux explorateurs.
- Christophe Colomb part en août 1492 à la recherche d’une route plus rapide vers les Indes. Il débarque en octobre de la même année sur une île des Bahamas. Il est persuadé d’avoir atteint l’Extrême-Orient et meurt sans savoir qu’il a découvert un continent inexploré.
- C’est Amerigo Vespucci qui sera le premier à penser que les terres découvertes par Colomb représentent un « Nouveau Monde ». Son nom sera donné au continent : l’Amérique.
- En 1498, Vasco de Gama contourne l’Afrique pour atteindre l’Inde.
- En 1522, Magellan organise le premier tour du Monde.
- En 1534 Jacques Cartier atteint le Golfe du Saint-Laurent et donne le nom Canada aux territoires alentours.
Documents
André Thevet (1516 – 1592)
Explorateur, écrivain et géographe Français, Thevet voyage d’abord au Levant avant de mettre le cap sur l’actuel Brésil, dont il revient avec un ouvrage important de l’histoire des récits de voyage, Les Singularités de la France antarctique.
Il y décrit avec plus ou moins de précisions les peuples, la faune et la flore du “Nouveau Monde”. Il sera le premier à décrire les Tupinambas, tribus guerrières d’Amazonie réputées pour leur cannibalisme.
André Thevet – Les singularités de la France antarctique (1558)
Il y a une herbe, qu’ils nomment en leur langue pétun, laquelle ils portent ordinairement avec eux, parce qu’ils l’estiment merveilleusement profitables à plusieurs choses. Or, ils cueillent soigneusement cette herbe et la font sécher à l’ombre dans leurs petites cabanes. La manière d’en user est telle : ils enveloppent étant sèche quelque quantité de cette herbe en une feuille de palmier qui est fort grande, et la roulent comme de la grandeur d’une chandelle, puis mettant le feu par un bout, en reçoivent la fumée par le nez et par la bouche.
Elle est fort salubre, disent-ils, pour faire distiller et consumer les humeurs superflues du cerveau. Davantage prise en cette façon, fait passer la faim et la soif pour quelques temps. Par quoi ils en usent ordinairement, même quand ils tiennent quelque propos entre eux, ils tirent cette fumée, et puis parlent ; ce qu’ils font continuellement et successivement l’un après l’autre en guerre, où elle se trouve très commode. Les femmes n’en usent aucunement. Vrai est que si l’on prend trop de cette fumée ou parfum, elle entête et enivre comme le fumet d’un fort vin. Les chrétiens étant aujourd’hui par-delà sont devenus merveilleusement friands de cette herbe et parfum ; combien qu’au commencement l’usage n’est sans danger, avant que l’on y soit accoutumé : car cette fumée cause sueurs et faiblesses, jusques à tomber en quelque syncope ; ce que j’ai expérimenté en moi-même. Et n’est tant étrange qu’il semble, car il se trouve assez d’autres fruits qui offensent le cerveau, combien qu’ils soient délicats et bons à manger.
Questions
- De quoi parle André Thevet ? Comment peut-on le savoir ?
- En vous basant sur tous les documents (en incluant l’image d’introduction de la partie) et votre culture personnelle, déterminez les différents intérêts que les puissances Européennes ont eu d’explorer le monde.
Quelques repères
- Après les grandes découvertes se développent les voyages d’exploration scientifique, rendues possibles grâce aux différents innovations techniques (permettant une meilleure navigation) et aux différents courants philosophiques et scientifiques (Jean-Jacques Rousseau, Darwin…). Les objectifs sont multiples : cartographier les différentes régions, découvrir de nouvelles faunes et flores et évidemment établir de nouvelles colonies. Ces grands voyages, se déroulant à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle vont permettre d’établir de nouvelles routes maritimes, rapprocher les différents territoires mondiaux et étendre la sphère d’influence Européenne.
- Dans les voyages célèbres, on peut d’abord citer celui de Louis-Antoine de Bougainville, première fois qu’un français entreprenait un voyage autour du monde, afin de trouver de nouveaux territoires à coloniser et trouver une nouvelle route vers la Chine. Le compte-rendu du voyage, publié sous le nom de Voyage autour du monde en 1771, va grandement inspirer les Lumières, notamment Diderot qui écrit l’année suivante Supplément au Voyage de Bougainville, lui permettant de remettre en principe l’organisation de la société.
- Autre explorateur célèbre, James Cook entreprit 3 tours du monde pour le compte de la Royal Navy Anglaise. Ces voyages resteront célèbres car ils apportèrent beaucoup de connaissances du pacifique aux Européens. De plus, Cook était accompagné de nombreux scientifiques et de deux peintres, permettant des représentations fidèles de territoires jusqu’alors inconnus.
Documents
Louis-Antoine de Bougainville (1729-1811)
Officier de marine et explorateur Français, Bougainville a mené le premier voyage autour du monde français. Le récit qu’il en a fait dans son Voyage autour du monde, journal de bord publié en 1771, fit sensation et inspira navigateurs, artistes, écrivains et philosophes. Il s’agit d’une des principales sources de ce qu’on appellera plus tard le mythe du “bon sauvage”, une idéalisation de l’homme à l’état de nature comme Bougainville a pu rencontrer sur les îles accostées pendant son voyage.
Bougainville – Voyage autour du monde (1771)
On a vu les obstacles qu’il avait fallu vaincre pour parvenir à mouiller nos ancres ; lorsque nous fûmes amarrés, je descendis à terre avec plusieurs officiers, afin de reconnaître un lieu propre à faire de l’eau. Nous fûmes reçus par une foule d’hommes et de femmes qui ne se lassaient point de nous considérer : aucun ne portait des armes, pas même des bâtons. Ils ne savaient comment exprimer leur joie de nous recevoir. Le chef de ce canton nous conduisit dans sa maison et nous y introduisit. Il y avait dedans cinq ou six femmes et un vieillard vénérable. Les femmes nous saluèrent en portant la main sur la poitrine, et criant plusieurs fois tayo. Le vieillard était père de notre hôte. Il n’avait du grand âge que ce caractère respectable qu’impriment les ans sur une belle figure : sa tête ornée de cheveux blancs et d’une longue barbe, tout son corps nerveux et rempli ne montraient aucune ride, aucun signe de décrépitude.
[…]
La hauteur des montagnes qui occupent tout l’intérieur de Taïti est surprenante, eu égard à l’étendue de l’île. Loin d’en rendre l’aspect triste et sauvage, elles servent à l’embellir en variant à chaque pas les points de vue, et offrant de superbes paysages couverts des plus riches productions de la nature, avec ce désordre dont l’art ne sut jamais imiter l’agrément. De là sortent une infinité de petites rivières qui fertilisent le pays, et ne servent pas moins à la commodité des habitants qu’à l’ornement des campagnes. Tout le plat pays, depuis les bords de la mer jusqu’aux montagnes, est consacré aux arbres fruitiers, sous lesquels, comme je l’ai dit, sont bâties les maisons des Taïtiens, dispersées sans aucun ordre et sans former jamais de villages ; on croit être dans les Champs Élysée.
[…]
Cependant il ne semble pas que le vol soit ordinaire entre eux. Rien ne ferme dans leurs maisons, tout y est à terre ou suspendu, sans serrure ni gardiens. Sans doute la curiosité pour des objets nouveaux excitait en eux de violents désirs, et d’ailleurs il y a partout de la canaille. On avait volé les deux premières nuits, malgré les sentinelles et les patrouilles, auxquelles on avait même jeté quelques pierres. Les voleurs se cachaient dans un marais couvert d’herbes et de roseaux, qui s’étendait derrière notre camp. On le nettoya en partie, et j’ordonnai à l’officier de garde de faire tirer sur les voleurs qui viendraient dorénavant. Ereti lui-même me dit de le faire, mais il eut grand soin de montrer plusieurs fois où était sa maison, en recommandant bien de tirer du côté opposé. J’envoyais aussi tous les soirs trois de nos bateaux armés de pierriers et d’espingoles se mouiller devant le camp.
Question(s)
- Qu’est ce que les voyages de Boungainville et de Cooke ont apporté à la connaissance du monde ?
- Pourquoi cherche-t-on à découvrir des choses par le voyage ?
Quelques repères
- Les cabinets de curiosité sont des pièces où sont entreposés et exposés des choses “rares, nouvelles et singulières”, qu’elles soient naturelles (plantes, minéraux…), artificielles (oeuvres d’art…), scientifiques ou exotiques. L’apparition des cabinets de curiosité coïncide avec une approche plus scientifique du monde.
- A leur apparition au XVIIème siècle, ils seront critiqués par de nombreux philosophes et écrivains, pour leur inintérêt et la vanité de la curiosité. René Descartes écrit : « Les hommes sont poussés par une curiosité si aveugle, que souvent ils dirigent leur esprit dans des voies inconnues, sans aucun espoir fondé, mais seulement pour essayer si ce qu’ils cherchent n’y serait pas ; à peu près comme celui qui, dans l’ardeur insensée de découvrir un trésor, parcourrait perpétuellement tous les lieux pour voir si quelque voyageur n’y en a pas laissé un… »
- Petit à petit, ces cabinets de curiosité vont se transformer à partir de la fin du XVIIIème en musée d’histoire naturelle, permettant de ne plus restreindre l’accès à quelques personnes privilégiées (les cabinets étant généralement d’ordre privé) pour faire découvrir au plus grand nombre la richesse de la nature.
Documents
Honoré de Balzac (1799 – 1850)
Ecrivain, journaliste, critique littéraire, Balzac a laissé une oeuvre romanesque majeure de la littérature française, avec plus de 90 romans et nouvelles, réunis sous le titre La Comédie humaine.
Son projet principale est d’explorer les classes sociales et les individus qui la composent, en les décrivant avec réalisme (du nom du style littéraire, en opposition avec le romantisme de la première moitié du XIXème siècle, qui faisait passer les sentiments au-dessus de la raison).
Honoré de Balzac, La peau de chagrin, 1831
Le jeune Raphaël de Valentin découvre la boutique d’un antiquaire
Au premier coup d’œil, les magasins lui offrirent un tableau confus, dans lequel toutes les œuvres humaines et divines se heurtaient. Des crocodiles, des singes, des boas empaillés souriaient à des vitraux d’église, semblaient vouloir mordre des bustes, courir après des laques, ou grimper sur des lustres […] Le commencement du monde et les événements d’hier se mariaient avec une grotesque bonhomie. Un tournebroche était posé sur un ostensoir, un sabre républicain sur une hacquebute du Moyen Age. […]
Tous les pays de la terre semblaient avoir apporté là quelques débris de leurs sciences, un échantillon de leurs arts. C’était une espèce de fumier philosophique auquel rien ne manquait, ni le calumet du sauvage, ni la pantoufle verte et or du sérail, ni le yatagan du Maure, ni l’idole des Tartares ; il y avait jusqu’à la blague à tabac du soldat, jusqu’au ciboire du prêtre, jusqu’aux plumes d’un trône. Ces monstrueux tableaux étaient encore assujettis à mille accidents de lumière par la bizarrerie d’une multitude de reflets dus à la confusion des nuances, à la brusque opposition des jours et des noirs. L’oreille croyait entendre des cris interrompus, l’esprit saisir des drames inachevés, l’œil apercevoir des lueurs mal étouffées […]
L’inconnu compara d’abord ces trois salles gorgées de civilisation, de cultures, de divinités, de chefs-d’œuvre, de royautés, de débauches, de raison et de folie, à un miroir plein de facettes dont chacun représentait un monde. […] La vue de tant d’existences nationales ou individuelles, attestées par ces gages humains qui leur survivaient, acheva d’engourdir les sens du jeune homme ; le désir qui l’avait poussé dans le magasin fut exaucé : il sortir de la vie réelle, monta par degrés vers un monde idéal, arriva dans les palais enchantés de l’Extase.
Roland Barthes (1915 – 1980)
Philosophe et sémiologue (qui étudie les signes) français, Roland Barthes a notamment écrit Mythologies, où il décrit des mythes aussi divers et variés que la Citroën DS, le vin ou le steak frite. L’une des théories de son oeuvre est que le mythe, quelqu’il soit, est un outil de l’idéologie : il permet aux classes dominantes (ici, la bourgeoisie) de véhiculer simplement leur vision du monde et l’imposer sa culture et sa morale au monde entier.
Roland Barthes, Mythologies, 1957
Nautilus et Bateau ivre
L’imagination du voyage correspond chez Verne à une exploration de la clôture. […] Le monde est fini, le monde est plein de matériaux numérables et contigus. L’artiste ne peut avoir d’autre tâche que de faire des catalogues, des inventaires, de pourchasser de petits coins vides, pour y faire apparaître en rang serrés les créations et les instrumentes humains. Verne appartient à la lignée progressiste de la bourgeoisie : son œuvre affiche que rien ne peut échapper à l’homme, que le monde, même le plus lointain, est comme un objet dans sa main […]. Verne ne cherchait nullement à élargir le monde selon des voies romantiques d’évasion ou des plans mystiques d’infini : il cherchait sans cesse à le rétracter, à le peupler, à la réduire à un espace connu et clos, que l’homme pourrait ensuite habiter confortablement. […]
Le geste profond de Jules Vernes, c’est donc, incontestablement, l’appropriation. L’image du bateau, si importante dans la mythologie de Verne, n’y contredit nullement, bien au contraire : le bateau peut être symbole de départ ; il est, plus profondément, chiffre de la clôture. Le goût du navire est toujours joie de s’enfermer parfaitement, de tenir sous sa main le plus grand nombre possible d’objets. […] Or tous les bateaux de Jules Verne sont bien des “coins du feu” parfaits, et l’énormité de leur périple ajoute encore au bonheur de leur clôture, à la perfection de leur humanité intérieure. Le Nautilus est à cet égard la caverne adorable : la jouissance de l’enfermement atteint son paroxysme lorsque, du sein de cette intériorité sans fissure, il est possible de voir par une grande vitre la vague extérieur des eaux, et de définir ainsi dans un même geste l’intérieur par son contraire.
Questions
Sur les deux textes ci-haut :
- Qu’est ce qui relie ces deux approches de la connaissance du monde ?
- Qu’est ce qui fait leur différence ?
Ecrire :
La visite d’un musée est-elle une forme de voyage ?